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Mesdames, maîtrisez votre prévoyance!

Investissement

12.02.2021, par Sandra Hegetschweiler, planificatrice financière

La liberté financière des femmes passe par une meilleure connaissance de leur situation. Alors, comment peuvent-elles assurer leur niveau de vie à la retraite?

Certains indices laissent croire que les femmes sont avantagées par rapport à la gent masculine à l’heure de partir à la retraite. En effet, un âge AVS plus jeune, un taux de conversion identique malgré une espérance de vie plus longue ou le versement de cotisations AVS plus basses pour des prestations plus élevées. La réalité, elle, est toute autre.

Un écart conséquent

Une nouvelle voiture Renault Clio. Voilà, en image, la différence de rente annuelle que perçoit un homme par rapport à une femme à la retraite. Bien sûr, c’est une moyenne, mais cet écart atteint près de 20'000 francs par année. Comment l’expliquer et surtout, que peuvent faire les femmes pour que leur retraite ne rime pas avec précarité?

L’étude de référence mandatée par l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) révèle une différence de 37% entre les genres en Suisse. C’est au niveau du 2e pilier que tout se joue car du côté de l’AVS, l’écart de rentes est limité : il atteint quelque 3% seulement.

Premier pilier, presque l’égalité

Dans ce premier pilier, le partage des revenus entre les conjoints (appelé splitting dans le jargon) et les bonifications pour tâches éducatives (un salaire fictif pour la garde d’enfants) permettent notamment de rééquilibrer les différences de revenus. Mais vivre uniquement de l’AVS est quasiment impossible pour faire face aux coûts de la vie. Pourtant, à l’heure d’ouvrir le chapitre de la vieillesse, plus d’une femme sur quatre ne dispose que de cette ressource, alors que ce n’est le cas que de 13% des hommes, selon un rapport présenté au Parlement en septembre.

Deuxième pilier, ça se gâte

Revenons donc à ces différences de revenus, qui constituent la source d’écart dans le 2e pilier, basé sur le principe de l’épargne conjointe employeurs-travailleurs. Le laïus est connu: outre le fait qu’à compétences égales, les femmes gagnent toujours moins que les hommes, les femmes sont plus nombreuses à ne pas travailler et parmi celles qui exercent une activité, près de 60% privilégient un temps partiel, contre moins de deux Messieurs sur dix.

L’arrivée d’un enfant dans le foyer constitue souvent un moment charnière dans la projection pour la retraite des femmes. En effet, même si la répartition des tâches au sein du couple évolue, les chiffres montrent que la réduction de l’activité professionnelle concerne davantage les mamans, encore en 2021. Et ce temps partiel entraîne un salaire aminci, duquel la déduction de coordination est appliquée de manière forfaitaire. Ce montant – 25’095 francs en 2021 - est déduit car il est déjà couvert par l’AVS, mais il ampute fortement le salaire brut, notamment si celui-ci est modeste.

Exemple fictif

Prenons un exemple fictif. Julie est assistante en pharmacie à Peseux (NE). Elle travaille à plein temps et perçoit un salaire annuel de 70'000 francs. Ce sont ainsi 44'905 francs qui seront assurés via sa caisse de pension. Ce montant s’élèvera à 9’905 francs seulement pour sa collègue Amandine, maman de deux enfants, engagée à 50%.

Certains employeurs permettent néanmoins à leurs collaborateurs à temps partiel de lier le montant des déductions de coordination à leur taux d’activité. Et si la personne occupe plusieurs emplois à temps partiel sans atteindre le salaire minimal, une demande d’affiliation peut être faite après avoir comparé les différents règlements des caisses de pensions.

Dans tous les cas, le retour à un taux d’activité plus élevé une fois que les enfants quittent le cocon pourrait constituer une mesure d’optimisation pour les femmes qui se soucient de leur prévoyance. Cela leur permettrait d’augmenter leur capacité d’épargne afin de rattraper les années manquantes de cotisations via des rachats auprès de leur 2ème pilier.

Troisième pilier, un levier à ne pas négliger

L’arrêt de l’activité ou le temps partiel influe également, via la baisse des revenus, la capacité à alimenter le troisième pilier. L’écart entre Monsieur et Madame dépasse ici les 50%. Cette prévoyance privée constitue un outil incontournable qu’il ne faut surtout pas négliger, s’agissant d’un levier que les femmes peuvent actionner aisément.

Pour cela, elles doivent être sensibilisées dès leur plus jeune âge à ces problématiques et encouragées à effectuer des versements dès leur entrée dans la vie active. Si l’horizon temps est suffisamment long, le recours aux placements financiers constitue la piste à privilégier.

Sur ce point, il est conseillé de vendre ces placements à la veille de ses 60 ans pour sécuriser les avoirs.

La prévoyance de la femme passe aussi par la nécessité de se poser les bonnes questions, par exemple en cas de concubinage, de divorce, d’invalidité ou de décès du conjoint. Ici, une analyse patrimoniale auprès d’un professionnel permet souvent de procéder à quelques ajustements.

Réformes en cours 

Si l’équité salariale doit constituer une priorité, la réforme d’un système déjà complexe est également en marche, aussi bien avec AVS 21 que LPP 21, les projets du Conseil fédéral étant désormais dans les mains des Chambres fédérales. Celui de la prévoyance professionnelle prévoit notamment des mesures pour les personnes à bas revenus et les temps partiels. Mais la connaissance des femmes et la maîtrise de leur prévoyance doivent constituer, pour l’heure, la priorité pour permettre à ces dernières de limiter les disparités, à défaut de les éliminer.

Cinq conseils phares

  1. Effectuez une analyse de prévoyance en cas de changement de situation personnelle.
  2. En cas d’arrêt d’une activité lucrative, s’assurer auprès de la Caisse de Compensation en tant que personne sans revenu professionnel.
  3. Effectuez des rachats d’années manquantes de cotisations dans le 2e pilier.
  4. Si cumul de plusieurs employeurs à temps partiel, demandez à être affiliée auprès de l’un deux après avoir comparé les prestations.
  5. Versez régulièrement sur votre 3e pilier et investissez dans des fonds de placement.

Une version de cet article est parue dans Générations.