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Immobilier: faut-il privilégier les investissements directs ou indirects?

Investissement

07.02.2022, par Vincent Schwery, gérant de fonds

L’immobilier constitue l’un des derniers bastions qui offrent encore des rendements relativement stables. Alors, si je veux y investir, quelle voie dois-je choisir? 

Au cours de la dernière décennie, le segment de l’immobilier a été porté par le contexte favorable d’après crise financière de 2008, marqué par la baisse des taux d’intérêts et des rendements obligataires. Dans cet environnement, l’immobilier de rendement présente des avantages considérables: rendements supérieurs à ceux du marché obligataire, revenus stables, risques modérés et couverture contre l’inflation. 

Dans le portefeuille des institutionnels suisses, qui investissent sur le long terme et qui ont longuement réfléchi à leur allocation d'actifs, l'immobilier représente entre 13% et 19% des actifs. La volatilité des prix inférieure et la corrélation faible de l'immobilier avec les marchés d'actions concourent de manière décisive à la diversification d'un portefeuille. Cette proportion reste indicative et s’adapte pour des clients privés à leur profil d’investisseur et à leur fortune. 

L’attrait de la pierre

Il est possible d’accéder au segment immobilier de deux manières bien distinctes : soit en direct avec l’achat d’un bien destiné à la location, soit de manière collective via des fonds de placement ou des sociétés de crowdfunding.  Le choix entre les deux modes de détention dépend de la situation et des attentes de chacun. 

Immobilier direct 

Pour bon nombre d’investisseurs, un placement dans « la pierre » se matérialise par l’achat en direct d’un ou plusieurs biens destinés à la location. En tant que propriétaire, vous détenez les droits réels de l’immeuble et êtes donc le seul bénéficiaire d’une potentielle plus-value en cas de vente. De plus, en limitant les frais des intermédiaires et grâce à des conditions de financement favorables, l’investissement direct est généralement plus rentable. Au travers des locations encaissées, les fonds propres investis dégagent des rendements annuels attractifs. Pour autant, un investissement dans l’immobilier en direct requiert certains moyens financiers et limite ainsi son accès à une catégorie d’investisseurs. 

La première contrainte est liée au ticket d’entrée. Investir de manière directe nécessite de mobiliser certains fonds propres, en principe au minimum 25% du prix d’acquisition, voire plus suivant le type d’immeuble et l’évaluation faite par le créancier hypothécaire. A cela, il faut ajouter les frais d’acquisition, tels que les droits de mutation et les honoraires de notaire. Il faut donc disposer des moyens pour un tel investissement, que ce soit en épargne disponible ou en capacité d’emprunt. Même dans ce cas, il sera difficile d’acquérir un parc immobilier offrant une diversification optimale. L’autre limite est liée aux risques de l’immobilier d’investissement. Des impayés sur loyers, une vacance prolongée de surfaces, des besoins imprévus d’entretien et une hausse des taux hypothécaires peuvent venir rapidement entamer le rendement, voire contraindre le propriétaire à devoir injecter des liquidités pour couvrir ses charges. Pour optimiser la gestion de leurs biens, les propriétaires peuvent mandater une gérance.

Immobilier indirect

Comparés à la propriété foncière, les fonds de placement offrent certains atouts. Ils sont plus liquides et peuvent par conséquent être achetés ou vendus sans délai au cours boursier du jour. Ils sont aussi plus accessibles car avec un investissement de base modeste, l’investisseur aura accès à des portefeuilles bien diversifiés en termes d’exposition géographique et de segments. Dans certains cas, l’avantage fiscal est aussi à prendre en considération. En effet, pour les fonds qui détiennent directement leurs biens immobiliers, l’investisseur privé n’a aucun impôt sur la fortune et sur le revenu en Suisse sur la part du fonds qui est investie, contrairement aux fonds à détention indirecte. 

Évolution rapide des cours

Bien entendu, les investissements en fonds immobiliers ont aussi leurs contraintes, comme la volatilité. En effet, les fonds voient leur valeur évoluer tous les jours. Des reculs relativement importants sont donc possibles, à l’image de la baisse de 20% observée entre le 24 février et le 17 mars 2020.
L’agio est une autre caractéristique à prendre en compte dans ce type de placement. Il s’agit de la différence entre la valeur d’inventaire des immeubles gérés par le fonds et son cours en bourse. Il se situe actuellement à environ 35%, un niveau historiquement élevé. Ceci signifie que l’investisseur paiera 135 francs pour acheter une part d’immeuble qui, théoriquement, en vaut 100. Pour certains fonds résidentiels, ce ratio dépasse même les 60%! En terme de performance, les fonds immobiliers auront progressé d’environ 6,5% par an sur les dix dernières années. Ces derniers offrent donc une certaine flexibilité et diversification et en contrepartie, l’investisseur devra tolérer les fluctuations boursières sous-jacentes et accepter un agio fluctuant.

Le crowdfunding immobilier, nouvelle tendance

Un modèle hybride est apparu récemment, le crowdfunding immobilier. Il s’agit de l’association de deux principes: celui du financement participatif et celui de l’acquisition immobilière de rendement dans sa forme traditionnelle. En finalité, le but est de démocratiser et de simplifier l’investissement immobilier en permettant à tous de devenir copropriétaire d’une fraction d’un immeuble. Chaque investisseur devient propriétaire au registre foncier à hauteur de la participation qu’il souhaite (généralement à partir de 20'000 francs). Cependant, il faut être très vigilant sur la rentabilité annoncée. De plus, la solvabilité des autres copropriétaires, que vous ne connaissez pas, est à surveiller. En effet, en cas de nécessité, est-ce que la majorité aura les moyens et l’envie de réinjecter du capital? Est-ce que vous pourrez liquider vos parts facilement et au bon prix? Autant de questions à clarifier avant de se lancer.  
Même si l’immobilier est généralement qualifié de «stable en valeur» et de «solide comme le roc», rappelons qu’il n’existe pas de rendement sans risque. Il s’agit de bien analyser son investissement, quelle que soit la forme. 

Bon à savoir : 

  • L’immobilier constitue une bonne source de diversification 
  • Détention, rendement, plus-value en faveur de l’immobilier direct
  • Liquidité, accessibilité et fiscalité en faveur de l’immobilier indirect
  • Le crowdfunding immobilier, un nouveau modèle qui doit faire ses preuves
  • Pas de rendement sans risque

Une version de cet article est parue dans Générations.